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Le divorce en France entre deux marocains

Le droit international privé permet de répondre aux différentes hypothèses correspondant à chaque couple qui souhaite divorcer. La situation franco-française ne présente que peu d’intérêt au niveau du conflit de lois.

Lorsque les deux époux ne sont pas tous deux de nationalité française, le première question qui va se poser est de savoir s’ils pourront divorcer en France. Et si c’est le cas, quelle loi va t-il falloir appliquer à leur divorce ?

La France a conclu avec de nombreux Etats des conventions internationales bilatérales ou multilatérales, et notamment avec le Maroc, de manière à régler les problèmes de conflits de juridictions et de lois. Certaines concernent évidemment la problématique du divorce.

Sur la juridiction compétente

L’article 11 de la Convention franco-marocaine relative au statut des personnes et de la famille du 10 août 1981 prévoit qu’ « au sens de l’alinéa a) de l’article 16 de la Convention d’aide mutuelle judiciaire et d’exequatur des jugements du 5 octobre 1957, la dissolution du mariage peut être prononcée par les juridictions de celui des deux Etats sur le territoire duquel les époux ont leur domicile commun ou avaient leur dernier domicile commun. »

Lorsque les époux ont leur résidence commune, ou dernière résidence en France, la juridiction française sera bien compétente.

C’est une solution de pure logique, et d’un point de vue pratique il est compréhensible que des résidents français souhaitent pouvoir divorcer en France.

La solution est plus complexe concernant la loi applicable aux effets du divorce aux époux, car la loi applicable va différer selon la matière et le juge va devoir parfois appliquer plusieurs lois.

Sur la loi applicable aux effets personnels des époux

L’article 9 de ladite convention bilatérale prévoit que : « La dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux Etats dont les époux ont tous deux la nationalité à la date de la présentation de la demande.

Si à la date de la présentation de la demande, l’un des époux a la nationalité de l’un des deux Etats et le second celle de l’autre, la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de l’Etat sur le territoire duquel les époux ont leur domicile commun ou avaient leur dernier domicile commun. »

L’article 10 quand à lui dispose que : « Les règles de conflit de lois définies à l’article précédent s’appliquent aux effets personnels qui découlent de la dissolution du mariage. Les effets relatifs à la garde des enfants et aux pensions alimentaires qui leur sont dues relèvent des dispositions du chapitre III de la présente Convention. »

Dès lors, en application de la Convention franco-marocaine, la loi applicable aux effets personnels du divorce est la loi marocaine.

Cela signifie qu’un Juge français va appliquer une loi qu’il ne maîtrise pas, ou qu’il n’a pas l’habitude de manipuler.

Il en va autrement de la loi applicable aux effets du divorce envers les enfants.

La loi applicable aux questions de la garde des enfants et des obligations alimentaires

La Convention franco-marocaine indique en son article 10 que « les effets relatifs à la garde des enfants et aux pensions alimentaires qui leur sont dues relèvent des dispositions du chapitre III de la présente Convention. »

Or le chapitre III de ladite Convention ne prévoit aucune règle directe d’applicabilité et ne tranche pas la question de la loi applicable à la question relative à la garde d’enfant et aux pensions alimentaires.

Il faut donc envisager d’autres règles normatives internationales et plus précisément un texte pour la question de la garde et un pour la question des obligations alimentaires.

– En matière de garde d’enfants : la Convention dite de « LA HAYE » du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants.

L’article 15 de ce texte prévoit que :

« 1.Dans l’exercice de la compétence qui leur est attribuée par les dispositions du chapitre II, les autorités des Etats contractants appliquent leur loi.

2.Toutefois, dans la mesure où la protection de la personne ou des biens de l’enfant le requiert, elles peuvent exceptionnellement appliquer ou prendre en considération la loi d’un autre Etat avec lequel la situation présente un lien étroit. »

La France est un Etat contractant, les juridictions françaises sont compétentes pour trancher un divorce entre deux marocain, ainsi le Juge français va pouvoir appliquer sa loi dans le cadre du divorce, aux effets du divorce sur la garde des enfants.

– En matière d’obligation alimentaire : Règlement (CE) n°4/2009 du 18 décembre 2008 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l’exécution des décisions et la coopération en matière d’obligations alimentaires.

L’article 15 de ce texte renvoie lui même au Protocole de LA HAYE : « La loi applicable en matière d’obligations alimentaires est déterminée conformément au protocole de La Haye du 23 novembre 2007 sur la loi applicable aux obligations alimentaires pour les États membres liés par cet instrument. »

Le protocole de LA HAYE de 2007 dispose enfin que :

« Article 3 : Règle générale relative à la loi applicable :

1.Sauf disposition contraire du Protocole, la loi de l’État de la résidence habituelle du créancier régit les obligations alimentaires.

2.En cas de changement de la résidence habituelle du créancier, la loi de l’État de la nouvelle résidence habituelle s’applique à partir du moment où le changement est survenu. »

« Article 4 : Règles spéciales en faveur de certains créanciers :

1.Les dispositions suivantes s’appliquent en ce qui concerne les obligations alimentaires:

a)des parents envers leurs enfants;

b)de personnes, autres que les parents, envers des personnes âgées de moins de 21ans à l’exception des obligations découlant des relations mentionnées à l’article5; et

c)des enfants envers leurs parents.

2.La loi du for s’applique lorsque le créancier ne peut pas obtenir d’aliments du débiteur en vertu de la loi mentionnée à l’article3.

3.Nonobstant l’article3, la loi du for s’applique lorsque le créancier a saisi l’autorité compétente de l’État où le débiteur a sa résidence habituelle. Toutefois, la loi de l’État de la résidence habituelle du créancier s’applique lorsque le créancier ne peut pas obtenir d’aliments du débiteur en vertu de la loi du for.

4.La loi de l’État dont le créancier et le débiteur ont la nationalité commune, s’ils en ont une, s’applique lorsque le créancier ne peut pas obtenir d’aliments du débiteur en vertu des lois mentionnées à l’article3 et aux paragraphes2 et 3 du présent article. »

La loi française, loi du lieu de résidence des parents comme des enfants mineurs créanciers, prévoit des règles relatives à l’obligation alimentaire des parents envers les enfants, le Juge va pouvoir l’appliquer dans notre hypothèse.

Si bien que le Juge se retrouve à devoir appliquer deux lois différentes dans le cadre d’un seul divorce. Ce qui a évidemment tendance à complexifier le divorce des époux.


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